7-9 janv. 2015 Villeneuve d'Ascq (France)

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Mobilisation des usagers au cœur du changement institutionnel : le cas de la réforme du secteur de la santé mentale en Belgique
Sophie Thunus  1@  
1 : Centre de Recherche et d'Interventions Sociologiques  (CRIS)
Boulevard du Rectorat, 7 4000 Liège -  Belgique

 

En 2007, les principales associations belges d'usagers et de proches avaient pour la première fois l'opportunité de participer ensemble à la politique de santé mentale. Concrètement, ces associations recevaient un rôle d'expert dans une expérimentation politique visant à dégager des bonnes pratiques de concertation thérapeutique pluridisciplinaire, à partir de projets-pilotes implémentés au niveau local.

Cette expérimentation comportait un volet professionnel, un volet scientifique et un « projet participation ». Ce dernier prévoyait que les associations forment des « experts par le vécu », qui participeraient aux concertations thérapeutiques afin de formuler des observations quant à la prise en compte de l'avis et des besoins des usagers lors des concertations, avant de rédiger des recommandations politiques à partir des bonnes pratiques observées.

Les volets professionnels et scientifiques de l'expérimentation ont donné lieu à de nombreuses controverses relatives à la légitimité respective des savoirs d'expérience et d'évidence revendiqués par les différents acteurs impliqués. Les associations d'usagers se sont distanciées de ces controverses et ont mené leur mission dans la plus grande indépendance.

Au printemps 2010, lors de l'annonce du lancement d'une nouvelle réforme de la santé mentale, il s'est avéré que cette méthode leur avait permis d'institutionnaliser leur participation au niveau politique. En effet, alors que les experts professionnels et scientifiques impliqués dans l'expérimentation précédente ne recevaient pas de rôle explicite dans l'implémentation de cette réforme, les associations y étaient clairement associées.

Dans cette contribution, nous proposons un compte rendu analytique du projet participation mené par les associations d'usagers et de proches entre 2007et 2010. Celui-ci permet d'identifier les méthodes de travail et les réseaux d'acteurs qu'elles ont développés à cette occasion. Ensuite, à partir d'exemples empiriques tirés de la réforme actuelle, nous montrons comment ces méthodes et ces réseaux leur permettent de renforcer leur légitimité auprès de la sphère politique. Enfin, nous mettons en évidence que cette légitimité construite au niveau politique constitue une ressource déterminante, afin d'augmenter la légitimité de la participation des usagers et des proches dans la sphère professionnelle et au niveau clinique.

Le matériau empirique utilisé a été récolté au cours de la recherche européenne« Knowledge and Policy in Education and Health Sectors » (FP7) et de ma recherche doctorale. Il est issu d'une analyse documentaire, d'entretiens réalisés entre 2009 et 2014 (n=75), et d'observations réalisées depuis mai 2012 (n=45).

Les analyses proposées mobilisent les apports de la sociologie interactionniste (construction de sens au cours d'un processus long) et de la sociologie de l'action organisée (construction d'une organisation locale du travail).


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